Affaire Med Point

11/02/2011 21:00

Malgré la bénédiction de Democracy Watch, par le truchement de Michael Atchia, l'acquisition par le ministère de la Santé de la clinique MedPoint au coût de Rs 144,7 millions continue à susciter interrogations et soupçons quant aux circonstances de ce "New Deal". Avec les premières explications du vice-Premier ministre et ministre des Finances, Pravind Jugnauth, tentant de prendre ses distances avec cette transaction foncière utilisant des fonds publics, le ministère de la Santé se retrouve sur la sellette quant au non-respect des procédures, que ce soit avant l'allocation de ce contrat ou post-adjudication. Initialement, la ministre Maya Hanoomanjee avait essayé maladroitement de détourner l'attention en faisant accroire que les procédures ont été scrupuleusement respectées par son ministère et le Central Procurement Board. De nouveaux éléments surgissant en cours de semaine font que l'étau se resserre autour du même ministère de la Santé. Par ailleurs, le MSM s'est également signalé par une maladresse politique et s'est retrouvé avec un carton rouge dans la campagne d'affiches autour de l'affaire MedPoint.

N'empêche, dans les milieux qui suivent avec assiduité ce nouveau feuilleton du "Family Business" politique, l'on soutient que le véritable tournant dans ce dossier devra avoir lieu au niveau du Board de directeurs de l'Independent Commission Against Corruption (ICAC) dans les jours à venir. En effet, avec le délai légal de 21 jours prévu par la Prevention of Corruption Act (POCA) arrivant à échéance, les commissaires de l'ICAC devront être en présence des premiers éléments pour décider s'il y a lieu de recommander une "further inquiry" en vue d'établir un "prima facie case" dans l'affaire de la clinique MedPoint, qualifiée par le MMM de "scandale du siècle".

À ce jour, l'ICAC, qui a réquisitionné tous les documents concernant le dossier MedPoint, disponibles que ce soit au ministère de la Santé ou au Central Procurement Board (CBP), s'apprête à surmonter un obstacle majeur dans les jours à venir. Un premier examen minutieux de ces dossiers doit être complété en vue de consigner les premières explications sommaires de la part des fonctionnaires, qui se sont vu confier la responsabilité de mettre à exécution le projet de création d'un "National Geriatric Hospital".

Au cours de la semaine écoulée, cette étape n'a pu être complétée, vu que le président du Bids Evaluation Committee, un haut fonctionnaire affecté au ministère de la Santé, avait été pris d'un malaise. Il a dû même se faire admettre dans un des centres hospitaliers spécialisés du ministère. D'aucuns affirment que ce haut fonctionnaire devra être à même de fournir aux enquêteurs de l'ICAC des éléments de réponses susceptibles d'élucider le mystère de la clinique MedPoint.

Les recoupements d'informations effectués par Week-End auprès des parties ayant participé à l'appel d'offres du 30 avril de l'année dernière et des sources officielles indiquent que le projet initial portait sur l'acquisition d'un complexe sur un terrain se trouvant dans un périmètre donné d'un hôpital pour le démarrage d'un hôpital spécialisé dans le traitement des maladies du troisième âge. "L'appel d'offres portait sur l'achat d'un immeuble couvrant une superficie minimale et d'un terrain. Il n'était nullement question d'équipements. D'ailleurs, la cotation que ma compagnie a soumise ne concernait que ces deux aspects au cas contraire, l'offre aurait été considérée comme étant Non-Responsive," a confirmé l'un des participants, qui se dit surpris du changement des critères d'appels d'offres en cours de route.

Le président du Bids Evaluation Committee, qui se trouve dans de beaux draps, devra fournir des explications sur les circonstances justifiant l'inclusion d'éléments étrangers aux conditions d'appels d'offres lors de l'allocation du contrat. "La véritable interrogation demeure l'identité de l'auteur de cette décision pour inclure les équipements médicaux, donnant ainsi à MedPoint un Edge sur les autres cotations. Il doit y avoir quelqu'un au ministère qui a fait une telle proposition. Cette réponse ne peut être fournie que par le président du comité d'évaluation", fait-on comprendre dans des milieux officiels.

À partir de l'inclusion de l'élément des équipements médicaux, une "Fresh Evaluation", communément une nouvelle évaluation, devient nécessaire, rendant caduque du même coup une première conclusion, à un prix nettement plus bas que les Rs 144,7 millions adjugées. L'ICAC se dit confiante de résoudre cette énigme en se penchant sur les échanges de correspondances officielles à ce stade des procédures, soit entre le 7 juillet et le 24 novembre 2010, date du feu vert du Central Procurement Board pour le choix de MedPoint.

Dans l'acte de vente rédigé par les soins du notaire Gunness Beeharry en date du 29 décembre dernier, la valeur des équipements médicaux et du mobilier est estimée à Rs 19 701 300, sans aucune garantie quant à la qualité ou à l'efficience de la part de la direction de la clinique MedPoint. Le rapport des différents ministères sur l'état de ces équipements médicaux et de ces effets mobiliers et les derniers rapports d'évaluation enregistrés au Registrar of Companies soit Rs 2,6 millions en 2007/08, devront déterminer si le ministère de la Santé a obtenu "value for money".

Justifiant le choix, la ministre de la Santé s'est même permis de déclarer que MedPoint mettra à la disposition du gouvernement deux unités de radiologie et de dialyse, un laboratoire et quelque 125 lits, autant d'éléments qui n'ont figuré nullement dans le document d'appels d'offres. L'enquête devra déterminer à quelle étape de l'exercice d'évaluation, ces considérations, susceptibles d'accréditer la thèse d'une "acquistion taillée sur mesure", ont été retenues.

Deux facteurs, qui pèseraient de tout leur poids dans le dossier à charge de l'affaire MedPoint, relèvent de la transparence. D'abord, des sources bien renseignées laissent entendre que les critères pour l'exercice d'évaluation des offres n'auraient pas été communiqués aux participants de l'appel d'offres. Ce "Scheme" sur les critères permettent aux soumissionnaires de mieux appréhender l'importance attachée aux différents aspects, soit la situation géographique, la superficie de l'immeuble et nullement "machineries, technical and other equipments fixtures and fittings and furniture" retenus pour l'ultime étape pour donner gain de cause à MedPoint.

L'autre manquement est encore plus "Damning" car de la décision du Central Procurement Board sanctionnée le 24 novembre 2010 à la fin de la semaine dernière, ni le ministère de la Santé ni ledit Central Procurement Board n'ont jugé utile de respecter une disposition de la loi, notamment informer tous les soumissionnaires des résultats.

Cette communication revêt toute son importance dans l'éventualité de la contestation de la décision. À partir de la date de cette correspondance officielle émanant du "Public Body", tout soumissionnaire dispose d'un délai de sept jours pour "challenge" le ministère, et de 30 autres jours pour saisir l'Independent Review Panel. Compte tenu du scénario mis en place, cette échéance est largement dépassée, rendant quasi impossible tout recours à cette instance.

Simple oubli des procédures ou astuce?! À l'enquête de l'ICAC d'apporter l'éclairage sur ces zones d'ombre, alors qu'en principe la mission première du Central Procurement Board est de veiller à la transparence des appels d'offres et à ce que le gouvernement obtienne "Value for Money"...

WEEK-END --- dimanche 6 février 2011